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![]() Un nouveau disque donc, "ou plutôt une jolie parenthèse de notre histoire", né au hasard d'une connexion pas comme les autres. D'une vibration comme aucune autre. Bertrand : " Andrej, un musicien originaire de Voivodine qu'on ne connaissait pas, nous a fait parvenir, par le biais d'un ami commun, un remixe de notre titre Septembre en attendant... C'est un morceau basique où il n'y a qu'une basse et une voix, sorte de petit poème. Il en a fait un "rhabillage plutôt trip-hop très touchant... Du genre qui s'accroche tellement dans le fond du cœur que je pouvais plus m'arrêter de l'écouter! Ça a été le déclancheur de tout ce qui allait suivre..." Emu par ce présent inattendu, le groupe s'empresse d'établir un contact avec le susnommé Andrei. L'idée d'un up/down-lifting artistique des compos du combo, se concrétise... Tandis qu'Andrei se voit confier la responsabilité du Lp. Un appel discret est lancé à tous les lutins musiciens du coin et c'est sous la forme d'un blind test, façon épreuve du baccalauréat, que sont sélectionnées les bandes des quelque trois cents candidats. Huit mois durant, c'est collé aux boomers et aux tweeters de leurs ghettoblasters, que les quatre redécouvrent seuls ou ensemble selon les cas, une partie de leur histoire revue et digitalisée par une partie de celle de quelques centaines d'étrangers... B. : "On avait déjà une petite culture teknoïde avant de se lancer dans ce projet. Le côté électronique était dans l'air et dans nos têtes depuis longtemps... Pour ma part, c'est par des potes hongrois très amateurs de musiques au sens large, que j'y étais arrivé... La réalisation d'un album de remixes nous était déjà venue à l'esprit mais il n'y avait jamais eu le "truc" extérieur pour nous motiver à le faire ! " Denis : "On était assez "protectionnistes"... Pendant longtemps on a eu pas mal de complexes à laisser d'autres gens toucher à nos compos... " Sergio : "Il nous fallait un déclic ! On ne se sentait pas la capacité de remixer nous même nos morceaux. Dans l'absolu, on avait envie de retoucher A l'arrière des taxis, de le faire plus machines... " B : " ça correspondait bien à cette histoire industrielle du début de siècle, du début du communisme à Moscou, de la vieille Europe avant la grande bascule... Comme on est aujourd'hui à une autre fin de siècle, avec la technologie et le futurisme, ça tombait plus qu'à point! Le riff aussi se prêtait bien à ce concept... Puis il y a eu ce fameux remixe de Septembre en attendant et petit mot touchant d'Andrei... La manière dont il a vu morceau... Une phrase dont il n'était pas sûr ("Entends-tu les autres qui se battent à la périphérie ?"), avait une double lecture, notamment avec la Yougoslavie et le fait que lui était à Belgrade... II l'a réutilisée, a rentré ce rythme complètement lancinant et découpé le texte d'une toute nouvelle manière. Quelque chose de magique, quoi! On a tous été pénétrés par sa vision! C'est devenu une vraie histoire, qui a entraîné plein de trucs et nous a donné envie d'aller plus loin. Et malgré toutes nos expériences préalables, "malheureuses" ou infructueuses. De là, on a lancé une sorte d'avis à la population sans pour autant taper dans la grosse communication : on ne voulait pas un truc énorme... Ça s'est su par le biais de la maison de disques et par le téléphone arabe et c'est pour cette raison que l'album a mis plus d'un an à se matérialiser. On savait que n'importe qui pouvait prendre nos bandes chez Barclay pour les retravailler... L'antiprotectionnisme absolu, quoi! (rire) Mais ça faisait partie du jeu, tout comme la décision d'opter pour la politique du blind test et de faire en sorte que notre choix soit pur et impartial. Certaines personnes, comme Franz et AI des Young Gods, ont échappé à cette "législation" en ce sens que l'info leur est parvenue directement, mais c'est une exception... On se doutait bien que nos deux univers ne pouvaient que se croiser!" (rire) Un travail de longue haleine donc, qui, s'il est aujourd'hui gravé, emballé, code-barré et prêt à consommer al dente, n'est pas néanmoins totalement terminé. Reste encore aux quatre gentilshommes à contacter, remercier et réconforter(?) les nombreux recalés des bacs. A savoir, tous les ex-locataires de l'hôpital FMR (One Eye Jack, FFF, Ethnician and co), l'actuel représentant de la jungle & core made in Belleville (le puissant Pushy/Mouse Clinic) plus quelques centaines d'autres d'ici ou d'ailleurs. S. : "C'est la moindre des choses : plein de gens ont bossé dur à cause de nous! On tient à leur témoigner à tous notre gratitude et notre regret de ne pas les avoir choisis mais on ne pouvait pas prendre le monde! On a reçu plein de trucs où il y avait des passages excellents mais qui ne le faisaient pas dans leur totalité... On aurait pu essayer d'appeler les artistes concernés et de les pousser à plutôt exploiter telle ou telle idée mais on ne voulait pas se replonger dans notre passé. On avait envie que cette histoire nous surprenne et nous fasse aller de l'avant!"
Au tableau des promus, plus d'une dizaine d'élus
plus ou moins reconnus.
Un besoin de doute, de flottement et de remises en question permanents que Noir Désir ou l'un des groupes français les plus gitans de sa génération, pourrait presque revendiquer, à comble de l'ironie, comme sa marque de fabrique la plus caricaturale. Une angoisse si violente de tomber dans la sédentarité, qu'elle l'aura sans cesse poussé à mieux se réinventer. A briser les carcans de l'estampille facile et à ne surtout jamais tomber dans le bad trip du "devoir" musical... S. : "On a besoin de se sentir libres, individuellement et en tant que groupe. La meilleure façon de conserver cette liberté, c'est de n'avoir la garantie qu'on va se retrouver pour faire autre chose! D'avoir toujours besoin de se réévaluer et de se poser la question de savoir si on est capable ou pas d'aller plus loin. Ce n'est pas un truc réfléchi mais c'est notre manière à nous de fonctionner..." De se quitter, se ressourcer pour mieux se retrouver. Et à chaque fois, comme par télépathie, sans le moindre décalage de timing ou de feeling... D. : "Pourtant, ça aurait pu être catastrophique ! Si on s'était retrouvés à écouter une trentaine de morceaux en ne tombant d'accord sur rien, cet album n'aurait pas eu de raison d'être ! Pour qu'il existe, il fallait qu'il soit une synthèse de ce qu'on pensait tous les quatre!" B. : "Pour sortir quelque chose de Noir Désir, il faut qu'il y ait un dénominateur commun suffisamment important, ce qui ne veut pas dire que dans nos projets personnels, on ne part pas dans des directions complètement opposées ! On est foncièrement différents... De plus en plus d'ailleurs !" D. : "Ce qui nous permet d'avoir encore plus d'ouvertures !" B. : "Parfois, je regrette que nos influences, ethniques ou autres, ne ressortent pas de manière plus explicite... Elles tombent dans une poche inconsciente, sont intégrées au reste de la mixture et resurgissent un jour ou l'autre, je ne sais ni comment ni pourquoi... Cet album par exemple, nous a donnéà réfléchir sur d'autres façons de procéder, ce qui ne signifie pas qu'on va se mettre à fond dans les machines dés demain matin ! Pour nous, ce disque n'est pas un reniement de notre passé mais il désacralise pas mal de choses et c'est tant mieux!! On est de ce monde et pas d'ailleurs !"
La réaction de son public rock et pointu de base, Noir Désir l'a depuis longtemps calculée et surtout dédramatisée... S. : "Plein de gens vont être super déçus, c'est inévitable mais qu'est-ce que tu veux qu'on y fasse ?!" B. : "Qu'on reprenne Maggie's Farm de Bob Dylan en acoustique puisque quand il l'avait jouée en électrique, tout le monde avait hurlé! (rire) Sérieusement, à partir du moment où on aime ce qu'on fait, on ne peut pas tricher! Si tu te sens en évolution, la pire tricherie est de t'auto censurer et de t'obliger à stagner pour conserver à tout prix, ton public ou "fonds de commerce"...! Non ! L'important est d'être vrai. Si tu changes et que les gens ne te suivent pas, c'est la vie ! On a de moins en moins envie de se faire enserrer dans un carcan qui ne correspondrait pas à cette espèce de masse évolutive qu'on est tous. Alors c'est vrai qu'en réaction à tout ça, on a de plus en plus envie de faire des photos de toutes nos périodes d'évolution ou d'ouverture, quitte à ce que soit profondément schizo ! Plus ça va, plus je regarde les disques que j'écoute et plus il est impossible d'y coller un genre ! On s'en fout des genres et de cette forme de censure culturelle ! Au final, tu n'es qu'un être humain à nu devant une musique ou une oeuvre et c'est juste ce que tu ressens qui importe ! On n'a jamais supporté les chapelles et c'est un problème auquel on est confronté en permanence ! Même quand on est entièrement en phase avec des aspects militants de l'histoire, qu'on se retrouve étiqueté "groupe militant" et qu'il n'y a plus que ça qui ressort, ça nous gêne parce qu'on est aussi autre chose! Il faut qu'on te coince dans un moule, qu'on banalise tout. Au final, ton engagement ne sert plus à rien ! Ça ne nous empêche pas de nous dire régulièrement, "on en a rien à branler !" et de continuer à nous mobiliser sur les choses qui nous touchent mais au bout du compte, notre marge est aussi large que le chas d'une aiguille... ce qui ne fait pas beaucoup! A une échelle qui n'a rien à voir avec la nôtre ; prends Brando qui s'est mobilisé toute sa vie pour les indiens d'Amérique et s'est retrouvé coincé et harcelé par tous les médias de l'époque parce qu'il était Brando! Je me doute qu'il devait savoir les remettre à leur place mais il en a quand même bien souffert... Il a continué, malgré tout, à dire ce qu'il avait à dire mais au final et même avec sa personnalité de monstre énorme, il a été obligé de s'enfermer dans sa tour d'ivoire impénétrable, sur son île ! C'est triste mais c'est le système qui veut ça ! Et plus tu es connu, plus on te met la pression en tentant de te discréditer, de réduire ton discours ou de t'accuser de faire ça pour le marketing !" Comme ce fût tristement le cas pour Emmanuelle Béart à l'époque de Saint.Bernard... B. : "Pareil ! Ça avait été particulièrement dur pour elle ! Mais on fait partie d'une génération qui a appris à douter de tout et c'est notre rôle à tous de réfléchir à la suite de l'ultra libéralisme et de la bipolarisation. De savoir s'il faut accréditer la fin de l'Histoire, si tous les combats sont finis et si on est sur le système parfait ! Tout semble indiquer que ce n'est pas le cas, ce qui donne enfin raison à pas mal de gens qui râlent depuis longtemps...!"
Absorbé par son implication parallèle au sein d'un collectif ethno free-jazz comme par la co-réalisation du nouveau skeud de Noir Désir, Bertrand résume en quelques mots rapides, la position actuelle du groupe quant à ses projets immédiats : "J'ai été tellement occupé à gérer tous ces moments de gestation que j'en ai été incapable d'écrire quoi que soit ces derniers temps !".Vu la mine inspirée des trois autres gaillards, on devine rapidement que c'est visiblement la même du côté de chez tout le monde. Alors autant se le dire tout de suite, pour ce qui est de l'avenir plus ou moins lointain du quartette, c'est à la Noir Désir, ou de façon top chaman, que les choses se feront. Ou ne se feront pas. En leur temps, si mère nature et sieur mescalito le veulent bien. En attendant demain, merci à eux pour hier et pour aujourd'hui. Pour la beauté de leurs rêves, pour l'authenticité de leur verve, pour leurs actions baston et aussi pour cette poignante mélancolie. A leurs étoiles à tous et Hasta Luego !.
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